vendredi 29 janvier 2010

Retour d’expérience sur un projet de plateforme collaborative

Quelques lignes pour présenter le bilan de l’implémentation et de l’utilisation d’une plateforme Microsoft SharePoint Server 2007 dans une organisation décentralisée, complexe et répartie sur plusieurs sites.

Contexte

Tout d’abord quelques considérations sur le contexte du projet. L’initiative émane du département IT constatant que l’utilisation d’un serveur de fichiers pour le partage d’information au sein d’un groupe de travail devenait problématique. Le choix de SharePoint est antérieur au besoin précité et n’implique pas les acteurs qui ont mis en œuvre ce logiciel. Il découle d’une décision de la direction basée sur les recommandations de consultants et sur les résultats non concluants d’un projet pilote d’un autre logiciel développé par une start-up. En s’appuyant sur cette décision il a été possible de proposer rapidement une réponse adéquate aux besoins collaboratifs de ce groupe de travail composé de personnes internes et externes (besoins sans lien avec la demande initiale pour laquelle la solution de Microsoft a été choisie).

Donc l’implémentation de cette plateforme a répondu à une requête métier émanant de la base et non d’une stratégie qui aurait été établie en haut lieu. Dans cet environnement précis, ça a certainement permis une plus grande agilité. Par contre, il en résulte une allocation minimale de moyens, un soutien faible des organes dirigeants, une considération marginale du produit au sein du système d’information et une concurrence forte avec d’autres solutions sans que le potentiel de synergies ne soit mis à profit.

Aucun développement spécifique ou ajout de fonctionnalités supplémentaires n’a été nécessaire, en fait SharePoint est utilisé « out of the box », seul un modèle standard de site collaboratif a été configuré. Celui-ci contient notamment des espaces pour les annonces, le dépôt de fichiers, un calendrier, une liste de contacts, la publication d’URL, un forum de discussion, des blogs et des wikis. Il n’a pas été mis sur pied de formations pour les utilisateurs. Seule une documentation succincte donne quelques explications spécifiques liées au modèle de site.

Après trois ans d’utilisation plus de 40 sites ont été créés avec environ 300 utilisateurs définis. Certains sites ont une forte audience alors que d’autres sont utilisés de manière sporadique.

Constats

Après la description du contexte voici les constats que l’on peut établir :
  • La plateforme SharePoint a été rapidement mise en place, à moindre frais, sans grandes difficultés. Par contre une personne de l’IT connaissant parfaitement le fonctionnement complexe de l’organisation, mais sans compétence Sharepoint, s’est fortement impliquée dans le projet. Il a bénéficié de quelques jours de consultance.
  • D’une manière générale les utilisateurs apprécient la simplicité d’utilisation de la plateforme collaborative, son intégration aux outils MS-Office et sa fonctionnalité de recherche « full-text ». Etonnamment il n’y a que très peu de demande de support et beaucoup d’utilisateurs s’approprient l’outil avec aisance. Bien entendu on rencontre aussi quelques « technophobes » pour qui tout changement d’habitude est synonyme de refus.
  • Le partage de documents se révèle être le service le plus utilisé. Par contre les fonctionnalités de « collaboration pure » telles que wiki, blog, forum peinent à décoller.
  • Il existe également des usages plus pointus comme l’utilisation d’une liste de tâches pour assurer le suivi des thèmes abordés lors des séances d’un groupe de travail avec génération automatique du procès verbal en format pdf (via MS-Access). Il y a aussi un site de gestion de projet avec la liste des activités attribuées, le graphique gantt associé et un tableau de bord affichant les principaux indicateurs du projet, un workflow d’approbation de documents ou encore un formulaire d’enquête développé avec Microsoft Office Infopath publié sur un site.
  • Le fait qu’il s’est agit d’un service supplémentaire offert à l’utilisateur pour collaborer, partager des informations sans qu’une stratégie globale n’ait été élaborée n’est pas optimal.
  • Le maintien de plusieurs outils avec des fonctionnalités similaires sans délimiter le périmètre de chacun d’eux engendre immanquablement quelques problèmes. Parmi ceux-ci l’absence d’intégrité de l’information provoquée par la réplication des mêmes données sur plusieurs supports, du travail supplémentaire et surtout une complexification inutile et contreproductive pour l’utilisateur par rapport à une source unique.
  • Les coûts de la multitude de technologies sont importants en termes de compétences, d’expertise, d’exploitation, de maintenance, de développement d’interfaces de synchronisation entre les systèmes, de formation des utilisateurs, de gestion des fournisseurs et d’intégration des systèmes. Il y a également une perte de productivité quand il s’agit de mettre à jour et de maîtriser des systèmes disparates, d’autant plus qu’à ce jour l’utilisateur ne dispose pas d’un système d’authentification unique.
  • La non intégration avec un annuaire d’authentification, donc l’utilisation d’un acompte supplémentaire avec sa propre gestion du mot de passe engendre un inconfort.
  • Malheureusement on doit admettre que l’on a reproduit les silos d’information avec des cloisons étanches entre les différents sites. Fort probablement que l’architecture de SharePoint, sans ajout de fonctionnalités complémentaires, favorise se comportement.
  • La gestion des droits d’accès est laborieuse et ne donne pas entière satisfaction.
  • Le wiki manque de fonctionnalités d’édition wysiwyg et de possibilité de structuration de l’information (par exemple la gestion de chapitres avec table des matières).
  • L’utilisation du navigateur de Microsoft, Internet Explorer est quasiment obligatoire, et oui les standards ne sont pas toujours respectés par les acteurs leader du marché.
  • La majorité du personnel du département IT est convaincu par ce type d’outil, y voit un fort potentiel de développement de synergies et de possibilités de rationaliser le partage de l’information.
Les évolutions

Pour le futur il s’agira d’orienter la plateforme sur une véritable solution de « réseau social d’entreprise » avec notamment la possibilité pour chaque utilisateur de publier son profil, de faciliter la visibilité des sites existants et la capacité pour chacun de demander un accès à l’administrateur du site qui l’intéresse, de décloisonner l’information, de trouver une solution pour que certaines données soient accessibles facilement à toute la communauté sans devoir la dupliquer, d’améliorer la recherche et le classement de l’information grâce aux tags et au rating et d’offrir une fonctionnalité de micro-blogging (à l’image de Twitter). En définitive, il s’agira de faire en sorte que la plateforme devienne un portail incontournable d’accès à la connaissance, à la collaboration, aux ressources et aux services permettant aux collaborateurs de réaliser plus efficacement leurs tâches quotidiennes. L’arrivée de SharePoint 2010 devrait apporter, d’un point de vue technique, des améliorations significatives dans ce sens. Pour le plus long terme l’intégration d’une solution de communication unifiée ainsi que des fonctionnalités de « mashup » pourrait compléter idéalement la plateforme.

Pour mener à bien ce programme ambitieux il faudra d’une part convaincre les « stakeholders » afin de positionner la plateforme à un niveau stratégique, le « bottom-up » se révélant insuffisant. Ceci contribuerait à dégager des synergies, à rationnaliser les processus et surtout à favoriser la fluidité des flux d’information. Et d’autre part de gros efforts de communication et de conviction seront indispensables pour amener les employés à travailler avec une philosophie 2.0. Le but final étant de gagner en agilité, en performance, en facilité d’adaptation aux changements et de mieux tirer parti du savoir global de l’organisation.